L’extension de l’accord du 4 juin 2024 relatif à l’attribution du « Ségur de la santé » à tous les salariés de la branche associative sanitaire, sociale et médico-sociale (Bass) a été actée cet été via la publication d’un arrêté au Journal officiel du 6 août 2024.
Ce texte rend obligatoire, pour tous les employeurs et tous les salariés compris dans le champ de la Bass, cet accord salarial prévoyant que les personnels qui ne percevaient pas la revalorisation « Ségur » en soient bénéficiaires.
Cette revalorisation est-elle applicable de manière rétroactive au 1er janvier 2024 comme l’indique l’accord du 4 juin ?
Pour rappel, sur les conséquences de la publication de l’arrêté d’extension, deux positions s’opposent :
1. L’indemnité Ségur ne serait obligatoire qu’à compter de la parution au Journal officiel de l’arrêté d’extension, c’est-à-dire à compter du 6 août 2024. En ce sens, les juges considèrent que les employeurs concernés par un arrêté d’extension ne peuvent pas être soumis rétroactivement aux dispositions étendues (Cass. Soc. 13 décembre 1973, n°71-40753).
2. Du fait de l’extension, les employeurs concernés devraient verser l’indemnité dans les conditions prévues par l’accord du 4 juin, c’est-à-dire à compter du 1er janvier 2024, en application de l’article 1.2 de l’accord.
En l’espèce, l’arrêté d’extension du 5 août 2024 indique :
• Article 2 : L'extension des effets et sanctions de l'accord susvisé prend effet à compter de la publication du présent arrêté pour la durée restant à courir et aux conditions prévues par ledit accord.
Cette disposition, complétée par la jurisprudence de 1973, suffit-elle pour considérer que l’arrêté d’extension rend la mesure Ségur d’application obligatoire pour les associations non adhérentes à Axess, à compter du 6 août 2024 (date de publication de l’arrêté au Journal officiel), c’est-à-dire sans application rétroactive ?
A ce jour, une incertitude demeure.
1. D’un côté, l’arrêté fait référence « aux conditions prévues par ledit accord », mais précise également que l’application se fera à compter de la publication de l’arrêté au Journal officiel, « pour la durée restant à courir », soit à compter du 6 août 2024. Il est donc défendable de considérer qu’il y a lieu de faire application de la jurisprudence du 13 décembre 1973 citée ci-dessus, et donc ne pas retenir le caractère rétroactif de la mesure.
2. D’un autre côté, on peut valablement considérer que la jurisprudence de 1973 ne vise que la situation classique d’un accord, sans effet rétroactif. Elle poserait le principe selon lequel, l’extension de l’accord ne permet pas de retenir comme date d’application la date d’agrément de l’accord. Or, en l’espèce la rétroactivité est prévue par l’accord, dans les modalités de versement de la mesure. Autrement dit, la jurisprudence ne serait pas opposable aux accords prévoyant une entrée en vigueur avec effet rétroactif.
Notre conseil :
Notre réseau est conscient des difficultés de financement rencontrées par nos adhérents. Une application rétroactive de la mesure, sans financement effectif, contribuerait à accentuer ces difficultés.
Pour cette raison, sans décision claire des juges sur le caractère obligatoire de l’application rétroactive de la mesure, nous conseillons, pour les ESSMS non adhérents à Axess, d’appliquer la mesure à compter du 6 août 2024 (donc sans rétroactivité) à défaut de décision plus favorable prise en interne.
A noter que cette interprétation résulte d’une prise de position en l’absence de positionnement clair sur ce sujet. Dès lors :
- D’une part, dans l’éventualité où une décision jurisprudentielle imposerait la rétroactivité, il conviendra d’effectuer une régularisation en paie.
- D’autre part, si dans les prochaines semaines une certitude se dessine quant au financement de la mesure à compter du 1er janvier 2024, pour toutes les structures concernées, peu importe leur adhésion à un syndicat employeur, une régularisation pourra également être effectuée.
Bien évidemment, nous vous tiendrons informé.e.s
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